2018

Galerie Ditesheim & Maffei

Richard Garzarolli

On n’avance pas aisément, avec les escarpins de nos mots, dans une forêt où tout n’est que tumulte, énergie en mouvement, grimaces d’une survie désespérée, cris déchirants et muets. L’émotion que produisent les images est indicible. Comme est indicible la beauté qui s’en dégage.

On devine vite que les croquis de Philippe Monod ne sont pas des gribouillages. Qu’ils dépendent d’une construction esthétique et philosophique rigoureuse, dense. Que l’artiste sublime dans la rigueur une liberté sans barrière.

Après des années de travail solitaire, il s’est jeté des hauteurs d’une sérénité lumineuse, où les couleurs chantaient une nature quasiment privée de corps humains, dans un corps à corps avec la décomposition de la vie terrestre. Dans le chaos des végétaux agonisants on devine ici un œil, là une lèvre, là de larges parties de corps, et très souvent des chevelures fanées. La décomposition est là, irrémédiable, pas encore figée mais frémissante dans les halos d’un dernier coucher de soleil. Comme si, jusqu’à la dernière seconde, la révolte face à la mort tentait de nier la fatalité.

Conformément à une trajectoire modeste, constante, fidèle à elle-même, Philippe Monod laisse le dernier mot à la beauté de l’image. Souvent celle-ci nous atteint comme un coup de poing. Il ne nous reste rien d’autre à faire qu’à panser nos plaies.

Richard Garzarolli

Chiangmai, le 16 juin 2018